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L'optogénétique rend les neurones photosensibles

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L’optogénétique est une technique qui rend les neurones photosensibles. Modifiés génétiquement, les neurones deviennent sensibles à la lumière. Après introduction d’une fibre optique qui envoie des signaux lumineux, certains neurones peuvent être stimulés, ce qui permet d’activer un circuit neuronal donné.  Dans une  synergie entre modification génétique et neurotechnologie,  l’optogénétique révolutionne les neurosciences depuis plus d’une décennie. Outil de laboratoire pour étudier les circuits cérébraux, son application s’est aujourd’hui  étendue à nombre de domaines. 

L’optogénétique est utilisée dans le domaine de la robotique. Des chercheurs de l’université Harvard ont mis au point en juillet 2015 un raybot, mi-robot mi-organisme vivant, dont la trajectoire et la mise en mouvement sont contrôlées par l’optogénétique. Constitué d’un corps en élastomère, d’un squelette en or capable de stocker l’énergie élastique, l’organisme est recouvert de cellules vivantes de cœur de rats génétiquement modifiées pour être photosensibles. Exposés à la lumière, les cardiomyocytes se contractent et les nageoires s’actionnent.  Chaque nageoire est réglée par rapport à un modèle lumineux spécifique, ce qui permet au robot de tourner. Cette nouvelle technologie laisse présager plusieurs retombées positives, notamment dans  l’ingénierie des tissus. Apprendre à structurer et contrôler les cellules du cœur pourrait amener à la création de cœurs artificiels pour la transplantation. 

L’optogénétique ouvre la voie à de nouvelles thérapies pour des maladies neurologiques. Le quotidien Les Echos évoque une étude menée par  des chercheurs en biologie et sciences cognitives du Massachusetts Institute of Technology, qui ont utilisé une technique de neuro modulation basée sur l’optogénétique pour comprendre ce qui dysfonctionne chez les patients atteints d’Alzheimer, le stockage de la mémoire, ou la récupération des souvenirs. Selon leurs travaux publiés dans Nature,  la récupération, et non le stockage, serait affectée par la maladie. Toujours dans le domaine de la mémoire, l’optogénétique fut la technique retenue par le prix Nobel Susumu Tonegawa dans une série d’expériences, publiée dans Sciences en 2013, qui réussit à implanter de faux souvenirs dans l’hippocampe de souris à travers la fibre optique qui activait par flash  l’engramme, réseau de neurones qui contient la trace biologique de la mémoire.  Elle est également très prometteuse dans la quête d’une guérison de la cécité.  Elle est utilisée par une start-up, RetroSense, pour traiter la maladie génétique de l’œil rétinite pigmentaire, entraînant la mort des cellules de l’œil. En mars dernier, les premiers essais cliniques ont été lancés.  

Qualifiée de « scalpel pour le neurobiologiste » par Pierre-Marie Lledo de l’Institut Pasteur qui introduit cette technologie en France, son développement et son officialisation sont largement attribués à deux chercheurs américains, Karl Deisseroth de Stanford University et Edward Boyden du Massachusetts Institute of Technology.  Un article publié dans Nature Neuroscience en Août 2005, “Milisecond-timescale, genetically targeted optical control of neutral activity“, avait le premier révélé ces nouvelles possibilités. Un article ultérieur, publié le 1er septembre dans le magasine Stat News avait remis en cause cette paternité, en affirmant que la méthode avait déjà été utilisée par le chercheur Zhu-Hua Pan de l’université  Wayne State dès 2004, mais sans publication, faute de financement et de reconnaissance. Ceci n’est pas sans rappeler le conflit existant au sujet du brevet sur la technologie CRISPR-Cas9, illustrant la difficulté de déterminer l’origine d’une découverte. 

Outre les perspectives de retombées positives dans le traitement de maladies neurologiques et de création d’organes artificiels, l’optogénétique, comme les autres modificateurs neuronaux, ouvre tout une série de questions éthiques liées au contrôle et à la modification de la mémoire, des souvenirs.

 

Pour aller plus loin:
https://www.statnews.com/2016/09/01/optogenetics/?s_campaign=tw&utm_content=buffer08f81&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_campaign=buffer
http://www.lesechos.fr/idees-debats/sciences-prospective/0211004987535-dans-les-meandres-de-la-memoire-2005787.php
https://www.technologyreview.com/s/601834/robotic-stingrays-made-with-rat-heart-algae-and-plastic-fins/
Roy, D. S. et al. Nature http://dx.doi.org/10.1038/nature17172 (2016).

 

 

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