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Comment fonctionne la vie : l'échec de l'analogie avec la machine. A lire, par P. Ball.

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 Nous sommes au début d’une profonde remise en question du fonctionnement de la vie, estime et espère à la fois Philipp Ball, écrivain scientifique au Royaume Uni. Dans How Life Works: A User’s Guide to the New Biology, ouvrage foisonnant,  il s’interroge sur les spécicités du vivant , la manière dont ces spécificités ont été interprétées au cours des siècles précédents et le besoin de réfléchir dans le cadre de nouvelles théories.  L’auteur effectue un impressionnant tour d’horizon de la biologie moderne et suggère qu’ « il n’y a (…) pas d’endroit unique où chercher la réponse à la question de savoir comment fonctionne la vie. La vie est un processus hiérarchique, et chaque niveau a ses propres règles et principes : il y a ceux qui s’appliquent aux gènes, aux protéines, aux cellules, aux tissus et aux modules du corps tels que le système immunitaire et le système nerveux. Tous sont essentiels, aucun ne peut prétendre à la primauté ».

Contre les métaphores en biologie.

Dans le chapitre The end of the machine, the new view of life, Philipp Ball part en guerre contre les recours aux métaphores utilisées pour expliquer le vivant, notamment celles de l’usine, de la machine, de l’ordinateur : “La métaphore organisationnelle, quant à elle, apparaît dans la manière dont les cellules sont communément décrites comme de minuscules « usines », au sein desquelles les biomolécules sont les ouvriers qui collaborent pour fabriquer des produits moléculaires délicats, en utilisant l’énergie des «centrales » que sont les mitochondries et en produisant des déchets qui doivent être éliminés ou recyclés. À ces métaphores plus anciennes s’en est ajoutée une autre dans la seconde moitié du XXe siècle : l’information. À l’ère de l’ordinateur numérique, les biologistes ont acquis la conviction que la vie elle-même était une sorte de calcul, un algorithme dicté par un code numérique d’instructions imprimées dans la bande de stockage de l’ADN“.

En biologie, les métaphores ont une dangereuse tendance à se transformer en « explications », et les représentations schématiques des résultats expérimentaux – comment un ensemble de molécules semble interagir, par exemple – peuvent être prises, même par des experts, pour des images littérales de ce qui se passe. L’un des messages fondamentaux de ce livre est que nous ne pouvons pas comprendre correctement le fonctionnement de la vie par des analogies ou des comparaisons métaphoriques avec n’importe quelle technologie …. Une distinction évidente mais très profonde entre la vie et les machines, par exemple, est que la vie doit être maintenue continuellement ou pas du tout : vous ne pouvez pas l’éteindre et la rallumer”.

La génétique : seulement  ‘l’un” des niveaux de la hiérarchie de la vie.

Loin d’un vaste programme à appliquer, d’un manuel d’instructions, la génétique représente pour P. Ball seulement l’un des niveaux de la hiérarchie de la vie : “les gènes ne sont pas des dictateurs égoïstes et autoritaires. Ils ne possèdent pas de véritable pouvoir, car ils ne peuvent rien accomplir seuls et n’ont pas la capacité de prendre des décisions. Ce sont des serviteurs, pas des maîtres“. Pour l’humain en particulier :”dans la mesure où la vie devient plus cognitive, elle dépend moins des gènes pour son fonctionnement réel. On pourrait dire que les gènes délèguent les responsabilités des décisions, de la maintenance et du comportement à des systèmes de niveau supérieur. Car après tout, l’évolution apprend et s’adapte à un rythme glaciaire, alors que les systèmes cognitifs peuvent apprendre et s’adapter en quelques secondes …(…)  Mais bien sûr, les gènes ne délèguent pas tout et ne peuvent pas le faire, car ils sont la base de l’héritage. Il reste donc important d’orienter les systèmes cognitifs vers les leçons à long terme imprimées dans les génomes : encourager la vie, pour ainsi dire, à adopter des comportements dont l’expérience évolutive a montré qu’ils favorisaient la survie et la réplication”.

Le premier réflexe du biologiste évolutionniste est de chercher des explications darwiniennes, de trouver des arguments pour expliquer pourquoi, d’une façon ou d’une autre, de tels comportements ont des avantages, si ce n’est pour l’organisme, du moins pour ses gènes. Et c’est peut-être parfois le cas : l’évolution fonctionne d’une manière qui, si elle n’est pas nécessairement mystérieuse, peut être contre-intuitive. Mais s’attendre ou même insister sur le fait que de telles explications adaptatives doivent exister, c’est se méprendre sur ce qu’est la cognition et négliger le fait que les gènes ont entamé depuis longtemps le processus de délégation du pouvoir causal. Si la cognition produit parfois des comportements non adaptatifs, cela peut être dû à sa nature même de système de réponse improvisé à des informations intégrées. Se demander pourquoi la sélection naturelle n’a pas éliminé les comportements contre-adaptatifs revient à se demander pourquoi elle ne nous a pas débarrassés du cancer ou des maladies causées par des protéines « mal repliées ». C’est ce que l’on obtient lorsque la vie fonctionne comme elle le fait“.

 

Ball, Philip. How Life Works: A User’s Guide to the New Biology (English Edition) (pp. 516-517). Pan Macmillan. Édition du Kindle.

Traduit avec DeepL.

 

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